Nijō-jō  ~  二条城

16 novembre

Le Nijō-jō
Le Nijō-jō : à droite le Palais Ni-no-Maru, à gauche, la deuxième enceinte et le Palais Hon-Maru (photo aérienne de Saki Fujimaki)

J'ignore tout de ce château. Au moment où ma fille m'y emmène, j'ignore même son existence !...

Et surtout, j'ignore tout de ce qu'est un "château" japonais. J'ai pourtant vu les films de Akira Kurosawa... Mais c'était il y a longtemps... Et je m'étais alors surtout intéressée à l'histoire et à l'esthétique...

 

Ma fille a donc décidé de m'en faire la surprise, vu que notre auberge est juste à côté et qu'elle connaissait son existence pour l'avoir déjà visité.

D'habitude je n'aime guère les surprises mais là, j'avoue que ce fut une bien belle surprise ! La découverte de château Nijō m'a même mis les larmes aux yeux d'émotion... (bon d'accord je suis hypersensible mais quand même)

 

Nous avons d'abord longé une longue avenue, avec une toute aussi longue haie, qui elle-même longe un long mur de pierres taillées, derrière lequel je devine un parc immense et de grands bâtiments bas... à l'angle formé par l'avenue avec une autre avenue à angle droit : une entrée de parking, puis encore une très longue haie en ligne droite et un mur de pierres : l'enceinte du château.

Et soudain, un pont de béton au-dessus de douves et nous voici devant la "porte" (Mon 門) d'entrée principale :

la Higashi-Ōte-mon :

 "porte" d'entrée (Mon  門 ) Higashi-Ōte-Mon du Nijō-jō
"porte" d'entrée (Mon 門 ) Higashi-Ōte-Mon du Nijō-jō

Que l'on ne s'imagine pas un château fort comme les nôtres... Et pourtant les ouvrages défensifs (cf. Le château de Matsumoto)  sont bel et bien là !

Il fut construit par Tokugawa Ieyasu, le premier shōgun, à la période Edo (1603-1867).

 

Peu après l'entrée, un plan explicatif.

Je n'en retiens qu'une chose : c'est immense. L'ensemble couvre plus de 27 hectares, 7 300 mètres carrés de bâtiments, 954 peintures, le tout est inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco !

Et ne perdons pas de vue qu'il est en pleine ville.

L'on perçoit nettement sur le plan les deux enceintes entourées de leurs douves : une première qui encercle tout l'ensemble et une plus petite mais plus haute, à l’intérieur de la première, protégeant le Honmaru.

 

Le Nijō-jō est composé de trois parties essentielles : 

  1. Le palais Ni-no-Maru (ou Ninomaru)
  2. Le palais Hon-Maru (ou Honmaru) 
  3. Les jardins, et les bosquets de cerisiers et pruniers, ainsi qu'au nord, un jardin récent (1965) :  le Seiruy-en et ses deux pavillons de thé (fermés au public)

 Plan du Nijō-jō

Source du plan : site Seasonal Views of Kyoto
Source du plan : site Seasonal Views of Kyoto

Après avoir passé la Higashi-Ōte-mon, et me retournant je vois émerger au-dessus des pins soigneusement taillés (Niwaki : technique de taille en nuage de l'ère Edo), le donjon d'angle (Yagura (櫓) Sud-Est (sur le plan : Southeast corner Dungeon Tower) que j'avais aperçu brièvement, avant d'entrer, sur la gauche du mur d'enceinte. 

Nijō-jō : Tourelle d'angle du mur d'enceinte
Nijō-jō : Tourelle d'angle du mur d'enceinte, près de la porte d'entrée

Le Palais Ni-no-Maru (二の丸)

Nous avançons sur cette esplanade, le long d'un bâtiment bas (servant de stand pendant les animations ou évènements, du moins je le suppose) et découvrons une autre porte, la Kara-Mon.

Très haute, très grande, somptueuse, magnifiquement ouvragée, bois sculpté, dorures, faite à n'en pas douter pour impressionner ceux qui passent en-dessous ! C'est la porte d'entrée, du Palais Ni-No-Maru (le deuxième cercle de défense).

La Kara-Mon (porte chinoise) est avant tout un symbole d'autorité : elle débouche sur l'entrée (le Mi-Kurumayose) des charettes, carrosses et palanquins des seigneurs (daimyō).

 

Tout ici témoigne d'abord du prestige du premier shōgun Ieyasu Tokugawa (1543-1616), qui fit construire le Nijō-jō en 1603 pour être sa résidence.

Quant au Ni-nomaru il fut édifié en 1626 sur le même modèle et sur les ordres du 3e shōgun, Iemitsu Tokugawa à l'occasion de la visite de l'empereur Go-Mizunoo.

Ces deux palais annonçaient, déjà, en filigrane, le renoncement de l’empereur au pouvoir au profit du gouvernement militaire des shōguns...

La Kara-Mon

Mi-Kurumayose (la cour des carrosses)

Arpès avoir passé la Kara-Mon, et avant toutes choses il convient de se repérer.

Nous sommes donc maintenant dans la cour des carrosses ou "honorable carriage approach" (Mi-Kurumayose), et pendant que j'admire deux grosses cloches de bronze, ma fille qui a reçu à l'entrée de la visite un fascicule consulte sérieusement le plan et le sens de la visite !

Le Palais

Le palais Ni-no-Maru a été édifié en 1626 sur les ordres du troisième shogun, Iemitsu Tokugawa. il servit surtout de résidence au shōgun lorsque celui-ci était de passage à Kyōto.  

1867 est l'année qui marque la fin du shōgunat. Le dernier shōgun Yoshinobu Tokugawa dut rendre alors le Ni-no-Maru à l'autorité impériale. 

Un an après, les cabinets impériaux déménagèrent au Nijō-jō. L'empereur y tient les premières assises de son gouvernement. Ce fut le début de l'ère Meiji.

Nous pénétrons donc dans le Palais Ni-no Maru : la porte est tout aussi impressionnante et somptueuse et toujours dans le style chinois.

Nous retirons nos chaussures et... bien entendu les photos sont interdites. Le parcours autorisé suit les corridors "extérieurs" : on peut voir les salles, mais on ne peut y pénétrer.

 

Sens de la visite t plan du Ninomaru - Extrait du guide donné à l'entrée
Sens de la visite t plan du Ninomaru - Extrait du guide donné à l'entrée

Le palais, construit en bois de cyprès, est constitué de six bâtiments, bâtis en diagonale, qui s’étendent sur 3300 mètres carrés. Et plus de 1000 mètres carrés sont constitués de plancher.

Chaque bâtiment est divisés en plusieurs salles avec des fonctions différentes. 

 

Les visiteurs de bas rangs sont reçus dans les premiers bâtiments du palais moins richement décorés, tandis que les visiteurs importants sont reçus dans les pièces intérieurs et plus proches des derniers bâtiments.

 

Les salles sont lumineuses, éclairées par les panneaux (shōji) en papier de riz (washi
 

Dans les pièces les portes coulissantes (fusuma), les  murs et les plafonds, en revanche, sont décorés de riches peintures attribuées à l'artiste Kanō Tan-yu (1602-1674).

Plancher et tatamis, dépourvues de meuble. 

Le Tozamurai-no-ma

Le premier bâtiment (le Tozamurai-no-ma) était celui où les samouraïs en visite attendaient.  Il est composé de 8 salles dont cinq pour les samouraïs (3 salles au tigres et léopards, et 2 salles aux pins et saules), une pour les messagers impériaux, une pour le stockage des marchandises...

 

Image de "Michaelasanda" (Japan77 Kyoto19 Nijō Castle Ninomaru Palace)
Image de "Michaelasanda" (Japan77 Kyoto19 Nijō Castle Ninomaru Palace)

Les pièces pour les samouraïs sont vastes, ornées de plafonds richement décorés de peintures et panneaux de bois sculptés, de tigres et léopards, des pins et des saules peints par Kanō Tan-yu ornent les fusuma .

 

Au sol, de simples tatamis.

Panneaux peints, se voulant impressionnants "tigres et léopards" du Tozamurai

 (exposition du KAB Kansai Art Beat)   

Shikidai-no-Ma et plancher rossignol

Le deuxième bâtiment, sobre lui aussi, et relativement petit est le Shikidai-no-Ma. Il est composé de quatre salles.

C'était là que les ministres du shōgun et les représentants de daimyō en visite se rencontraient et échangeait des cadeaux. 

C'est également dans le Shikidai-no-ma que se réunissait le conseil des ministres du shōgun. Les peintures représentent des oies sauvages au printemps et à l'automne, et des hérons sous la neiges.

 

Je remarque alors que le corridor par lequel nous longeons Shikidai-no-ma, aux lattes de bois luisant de la patine des milliers de pas qui les ont parcourus, se mettent à bruisser, ou plutôt à chanter !

 

Ma fille me chuchote alors "c'est le plancher rossignol ! Il chante pour prévenir le shōgun de l'arrivée de visiteurs !" Et oui, le shōgun craignait tellement pour sa vie qu'il avait imaginé ce stratagème de "plancher rossignol" (uguisubari)!

Corridor au plancher rossignol du Shikidai-no-ma (credit photo site de SoraNews24)
Corridor au plancher rossignol du Shikidai-no-ma (credit photo site de SoraNews24)

N'oubliez pas de mettre le son :)

Le Grand Hall (Ohiroma-no-ma)

Dans cette grande salle (d'où son nom) chargées de peintures dorées, le shōgun, installé sur une estrade recevait ses ministres agenouillés et en rang parfait.

Le Grand Hall Ohiroma-no-ma, et reconstitution d'une visite au shōgun et ses ministres (cliché mis à disposition du public)

Le Kuro-shoin

Le Kuro-shoin (la "salle d'études noire"), la salle des audiences privées du shōgun avec les daimyō du plus proche cercle, est de taille plus réduite, mais les œuvres d'art sont plus raffinées. Elles sont l'œuvre du plus jeune frère de Kano Tanyu : Naonobu

C'est là que se réunissaient, en présence du shōgun le groupe de daimyō des domaines féodaux appartenant à une branche du clan Tokugawa appelés aussi daimyō héréditaire.

 Chambre des audiences du shōgun, le Kuro-Shoin  (photos Nijo-jo Castle - carte postale vendue au château)
Chambre des audiences du shōgun, le Kuro-Shoin (photos Nijo-jo Castle - carte postale vendue au château)

Enfin le dernier bâtiment : le Shiro-Shoin ("la salle d'études blanches") était le lieu de vie du shōgun, et ses épouses (et concubines sans doute ?)

Nous ressortons de la visite et longeons, côté jardin, le Grand Hall (Ohiroma-no-ma). Les extéreurs sont très sobres !

Devant le corridor au "plancher rossignol" un groupe d'étudiants, cherchent à voir et comprendre quelle est l'astuce pour que le plancher "chante", en écoutant les explications de leur professeur.

Les jardins du Ni-no-Maru

A l'entrée du jardin : deux cloches de bronze ouvragées : des "tsurigane".

L'une provient du palais du Shoshidaï  (Palais du gouverneur situé à Gion - disparu aujourd'hui) et l'autre était dans le Nijō-jō. La première sonnait l'alerte en cas d'attaque (provenant de l'Est) et la seconde prenait le relais pour alerter la garnison 

(sources : Japon le Soleil Rouge)

Les tsurigane - cloches de bronze de temple
Les tsurigane - cloches de bronze de temple

C'est avec plaisir que nous retrouvons le calme et la sérénité des jardins du Ni-no-Maru, sa mare, ses petits ponts et lanternes de pierre et quelques érables rougissant !

Le Honmaru (本丸)

Le Honmaru originel (bâti en 1603 par le 1er shōgun Ieyasu Tokugawa) était similaire au Ni-no-maru. Un donjon (tenshukaku) de cinq étages avait été édifié par la suite par le 3e shōgun Iemisu Tokugawa.

Mais en 1750 ce donjon a été détruit par la foudre, et il n'en reste que la base, depuis laquelle on peut désormais admirer la vue générale du Honmaru.

Quant au Palais Honmaru il fut détruit en 1788, par un incendie qui ravagea Kyoto. Et ne fut pas reconstruit.

Après la chute du shōgunat, une résidence impériale fut déplacée du palais impérial de Katsura à l'Honmaru.

 

On ne visite que les extérieurs du palais Honmaru.

Les pierres du mur d'enceinte sont impressionnantes ! Le jardin agréable, les camélias en fleur et les bâtiments tout autant ! 

L'après-midi avance vide et le Nijo-Jo va fermer... Il est temps de retourner à notre auberge. Sur l'esplanade, vers la porte principale, Ma fille se laisse tenter par des senbei (gâteau sec) sucrés au Yuzu et sésame (délicieux) que nous allons déguster "chez nous" avec une bonne tasse de thé. 

 

Mais la soirée n'est pas finie !!!

Kyōtō - senbei du Nijō-Jō au yuzu et sésame
Kyōtō - senbei du Nijō-Jō au yuzu et sésame

La nuit est tombée sur Kyōto.

Après avoir regardé nos courriels, sorti, trié et rangé nos photos dans le lobby encore calme de l'auberge, nous montons sur le toit terrasse pour embrasser la vue d'ensemble "by night" de la ville.

Vue sur Kyotō depuis le toit terrasse de la "cheapest Inn"  (kyotokko)
Vue sur Kyotō depuis le toit terrasse de la "cheapest Inn" (kyotokko)

Il fait décidément bien froid !

Pull et grosse veste et nous partons manger un curry dans un restaurant que ma fille a repéré dans l'après-midi et où nous avons rendez-vous avec Shinpeï le cuisinier serveur du "Kuyoh hotel" que son patron a envoyé à Kyōto afin de tester différentes choses car il voudrait changer le concept du Juyoh...

 

Ce sera donc mon premier curry japonais.

Nous mettons un peu au point notre journée de demain, mais nous la voudrions "reposante" car celle d'aujourd’hui fut longue (j'ai très sommeil !). Nous donnons encore rendez-vous à Shinpeï pour l'après-midi.

Le matin nous irons vers Gion.... et visiterons un ou deux temples... tranquillement...

 

Pour l'heure il est temps de regagner nos lits superposés pour une bonne nuit de sommeil. Nous l'espérons en tout cas.  


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